Notre Histoire-Le folklore : 1850-1950

Avant de se souvenir des années noires, nous allons essayer de nous remettre en mémoire les façons de vivre du village avant que la “diaspora” et l’uniformisation de la télévision n’aient gommé les particularités locales. Pour classer les choses nous parlerons des points forts de la vie, des fêtes annuelles, de la vie de la journée.

La naissance : les femmes accouchent en général à la maison, les matrones font office de sage-femme, la grosse peur c’est l’hémorragie. Les hommes n’assistent pas à l’événement. Les registres d’état civil montrent que c’est le père ou le grand-père qui vient faire la déclaration à la mairie.

Malgré les divisions politiques, la religion n’est pas abandonnée et pratiquement tous les enfants sont baptisés. Pour l’aîné, la coutume veut que les parrains soient un grand-père d’une famille et la grand-mère de l’autre côté. Le baptême est l’occasion de réunir pour un banquet les deux familles ; au dessert on chante ou on raconte une histoire. La communion solennelle est aussi l’occasion de fêtes familiales ; les jeunes sont préparés dans une période de « retraite ».

Le conseil de révision : les jeunes « de la classe », 20 ans dans l’année, sont convoqués au chef-lieu de canton où ils défileront tout nu (chair à canon) devant notables et maires alignés bêtement et faisant semblant de regarder ailleurs ou de discuter avec le voisin ; le marchand de cocarde fait recette, les troquets aussi. Il est convenu de faire goguette après l’opération. Dans le temps, la chanson des conscrits était :
“ Sem de la classe
Sem de la classe
D’aquéla que passe… ”
Le tirage au sort fera place à la conscription générale. Du temps du tirage marchands d’hommes et remplaçants sont à l’affut du client à la sortie.

Le régiment : en dehors des périodes de guerre c’est l’ennui, on compte les jours égrenés de corvée, de punitions mesquines, de manœuvres ; il est bien recommandé de faire son devoir sans se faire remarquer, surtout ne pas « faire l’intelligent » ; le sergent abruti par la coloniale y verrait malice. Et puis un certificat de bonne conduite est bon à prendre à la sortie ; ça peut aider à rentrer à l’administration ou au chemin de fer. On apprend des chansons, ça peut servir aux mariages ou communions.

Tribulations du troupier (extrait) :

Fiers et contents comme des rats d’église
Pauvre sergents ne vous pavanez pas
Car vos galons, vrai galons de bêtises
Dire que chez vous l’esprit est sur vos bras
Vous qui savez astiquer la giberne
Noircir, polir votre beau ceinturon
Examiner si nos armes sont ternes
Mais hors de ça à quoi êtes vous bons?

Les fiançailles : ce n’est pas toujours l’amour…, à Maisonneuve des personnes se chargent de servir d’intermédiaire pour les demandes, il faut que les familles soient d’accord ; que les situations correspondent, que l’on cause des espérances ; le « praticaïre » a bien à faire ! Si on est d’accord on commence à se fréquenter, c’est à dire à sortir ensemble sous la surveillance sournoise et permanente de la communauté, il y a des yeux partout !

Le mariage : si on a du bien, on fera un contrat chez le notaire et c’est la cérémonie. La communauté des jeunes s’est réunie plusieurs soirées pour préparer l’arc de triomphe devant la maison de la mariée avec des branchages ornés de roses en papier.

Après la cérémonie à la mairie et à l’église (sur les deux familles il y en a bien une pour être attachée à la religion) banquet monstre, histoires, chants; chacun sait déjà l’histoire ou la chanson mais ça ne fait rien, ça fait partie de la tradition ! Le garçon d’honneur passe sous la table, ôter la jarretelle de la mariée, très marrant. Le soir on remet ça au souper, cette fois il a fallu inviter « les jeunes » et il faut les faire danser. Les mariés s’éclipsent discrètement. La chasse va alors commencer, les jeunes doivent trouver l’asile des « novis » (bien malin qui réussit à tromper l’inquisition) et alors ils feront irruption dans la chambre nuptiale, échauffés et à demi grisés, ils obligeront les époux (qui souvent sont encore tirés à quatre épingles, ils attendaient ça) à boire la soupe à l’oignon dans un pot de chambre si possible maculé de chocolat, hilarant ! Ces rites issus de la nuit des temps marquent que l’épousée est la propriété de la communauté des jeunes qui par ces rites de passage abandonne sa possession à l’époux : malheur au déviant, le veuf qui se remarie aura droit à un orchestre de casseroles et de lazzi jusqu’à ce qu’il offre à boire aux jeunes, après le charivari ! D’autres viendront supplier le maire de les marier en pleine nuit en catimini et de les amener au train de Beaulieu pour échapper à l’ire parentale !

Les enfants : il faut un garçon pour continuer la « méno », la race. On craindra longtemps les épidémies, meurtrières dans le pensionnat (si on peut payer des études pour être instituteur ou ingénieur si on a vraiment des sous) ; le croups est particulièrement redouté.

La maladie : des médecins s’installent mais on consulte aussi les femmes qui connaissent les simples, le berger vous guérira vos verrues à distance, il les « pense », il y a aussi le « penseur » pour les brûlures, il vous soulage le mal en le prenant sur lui à l’aide de formules consacrées (on dit qu’ il conjure les brûlures) ; si on a la jaunisse il faut aller « manger une omelette à Lagorce » ou « manger le sucre à Beaulieu » ; le pétassaire vous remettra les articulations en place…, celui de Bessas est réputé.

La mort : l’enterrement est précédé de visites au domicile du mort, si on n’est pas enterré à l’église vous aurez droit à un petit discours au cimetière, si ça se fait à l’église il est admis d’aller attendre la sortie de la messe au café d’en face pour bien montrer qu’on ne fait pas partie des catholiques pratiquants. A la sortie du cimetière il faut serrer la main à la famille en rang d’oignon en disant que c’est toujours les meilleurs qui partent, mais l’on voit bien ceux qui sont vraiment sincères.

Les fêtes annuelles c’est : le jour de l’an, carnaval, les rameaux, Pâques, la voto, Noël, sans compter les fêtes de récoltes : battage (la batteuse succédera au piquage du blé au rouleau sur l’aire) et vendanges, et aussi la « tuade » du cochon. Toutes ces occasions festives mélangent rites chrétiens et païens.

Le jour de l’an : les enfants vont faire le tour de la famille « présenter les voeux », ils reçoivent des étrennes, les rapiats se font prier pour mettre la main au porte-monnaie.

Le soir de carnaval : les jeunes déguisés et masqués font le tour de toutes les maisons on doit leur payer à boire et essayer de les faire parler pour les reconnaître.

Les rameaux : messes décorées de buis décorés de friandises pour les enfants ; Pâques : pendant la semaine sainte « les cloches s’en vont », les enfants passent les crécelles (on appelle ça “ passer les ténèbres ”) dans tout le village pour remplacer les sonneries, on mange un gigot le jour de Pâques et le lundi on va manger l’omelette à Païolive, cette tradition sera reprise plus tard par… le parti communiste !

La Saint Jean est très fêtée, c’est la vieille fête païenne du solstice, tout l’après-midi les enfants et les jeunes ont quêté les fagots dans tout le village, le soir venu on se réunit dans chaque quartier pour allumer de grands feux, la coutume veut que l’on saute le brasier, ça porte bonheur, les plus hardis commencent, les enfants en culotte courte ont le poil grillé, l’odeur s’en répand ; les plus âgés attendront que le brasier se soit un peu calmé.

La Voto est organisée par les jeunes de la classe qui paieront l’orchestre, s’ils ne sont pas assez nombreux les autres jeunes les aident à l’organisation et à tenir la buvette. Ils servent aussi à assurer le service d’ordre car certains après avoir bu -ce sont souvent toujours les mêmes- s’amusent à vouloir tout casser ; l’entrée au bal est gratuite, ce qui fait recette c’est la boisson, sirop, bière, limonade et marquisette. Le bénéfice sert à payer un voyage ou un bon repas aux organisateurs. La vote de Maisonneuve a souvent plus de succès que celle du chef-lieu. Le lundi est le jour du concours de boules. Les vrais boulistes jouent au jeu Lyonnais  » la longue », les boules de buis cloutées ont laissé place aux boules d’acier. Pour accroître la participation on adjoindra un concours de pétanque. Le dimanche a eu lieu l’aubade aux habitants, chacun demande aux musiciens l’air à sa convenance et donnera son obole en échange d’un gâteau « la fougasse ».

Noël : c’est la messe de minuit, l’église a été ornée d’une crèche avec des santons géants d’un décor naïf. Repas au retour en famille et distribution d’étrennes, la coutume du père Noël est d’introduction récente.

La tuade du cochon : on invite la famille, il y a toujours un spécialiste pour chaque opération, égorger, ébouillanter, faire le boudin, faire les caillettes, boulettes d’herbes pétries avec de la charcuterie. La plaisanterie rituelle c’est d’envoyer un jeune enfant chez un voisin, avec une mission présentée avec beaucoup d’importance, « aller chercher le moule à caillettes », bien sûr cet instrument n’existe pas mais le voisin se doit de remettre à l’enfant un colis confectionné en emballant de vieux instruments de cuisine- hors d’usage ou autres… Hilarité au retour devant la mine déconfite du pauvre gamin (on ne l’y reprendra plus !) au déballage à l’arrivée.

La batteuse : un entrepreneur passe à tour de rôle dans chaque ferme, tout le jour fermier et voisins à la rescousse battrons le blé. Un opérateur décharge les gerbes des charrettes avec sa fourche, un autre les délie d’un coup de couteau, on les présente à la machine. La paille est récupérée et assemblée sur l’aire en « pailler », le grain est récupéré dans des sacs « les boges » que l’on noue avec une ficelle. Repas monstre le midi pour récupérer, il a été préparé par les femmes de la maison.

Les vendanges : il y a deux équipes les porteurs et les coupeurs. Les coupeurs se mettent à deux par rangée, les équipes des divers rangs « font la course » mais gare à celui qui oublie des grappes. Les coupeurs vident leurs paniers ou leur seau dans des caisses à section trapézoïdale « les caisses de vendanges » que les porteurs emmènent en bout de vigne, on les empile sur les charrettes en séparant chaque rangée par des planches. Le chargement est ramené à la maison où l’on foulera le raisin et plus tard à la cave coopérative où le chargement est pesé avant et après livraison ; la teneur en alcool du raisin y sera mesurée. Le travail est pénible mais on travaille en groupe ; on discute et on plaisante et puis on se reconstitue par de bons repas. Des équipes sont embauchées pour renforcer la famille (les enfants sont mobilisés), les vendangeurs viennent du Gévaudan, et plus tard d’Espagne. Ils reçoivent un salaire dont une part est réglée en nature par attribution de vin.

La vie de tous les jours est rythmée par les travaux agricoles ; on se lève à l’aurore pour soigner les bêtes et entamer sa journée de travail ; on fait la pause a mi-matinée. Pour un déjeuner : si on va travailler un champ éloigné, on a emporté la nourriture et la boisson dans une besace (la « biasse »). Repas à midi, sieste l’été (la « dormie »), travail, soin aux animaux, souper (on ne dine pas on « soupe », c’est logique puisqu’on mange la soupe), veillée en famille et avec les voisins, on bricole et surtout on jacasse, tout y passe. Les ménagères se retrouvent au magasin pour faire leurs courses, boulanger, épicier, boucher, si on se débrouille bien on aura vu toutes les voisines et on sera au courant de tout. Le cas échéant on se rend à Maisonneuve pour faire ferrer ses bœufs ou faire arranger sa charrette ; en regardant travailler l’artisan on discute… avant d’aller boire un coup au bistrot du maréchal.

Les enfants vont à l’école, ceux qui ont été désignés pour nettoyer la classe ou allumer le poêle l’hiver partent plus tôt. La présence de deux écoles est l’occasion de querelles et de bagarres, mais on se retrouvera à la sortie pour s’amuser en bande. Le jeu est « la boîte » : on désigne un des joueurs, il va se cacher les yeux en comptant jusqu’à 100 (il « pluque »). Pendant ce temps les autres se cachent dans le village. Le joueur qui a « pluqué » doit retrouver les autres sans que l’un d’entre eux ne réussisse à taper du pied sur une botte de conserve. Le premier découvert sera alors le gardien de boîte. Les jeux ne sont pas très variés mais on s’amuse comme on peut et la matière première de l’équipement ne coûte pas cher.

Le temps qu’il fait est l’objet de surveillance permanente, on essaie de prévoir les conséquences sur les travaux agricoles. Les indicateurs sont la température, les nuages, le vent, le comportement des animaux.

Le vent :

  • Le vent du nord est la biso, on l’appellera plus tard le mistral comme dans la vallée du Rhône. Il souffle dès l’échauffement du sol par le soleil jusqu’au couchant par rafales rageuses, cela durera trois jours, six jours ou neuf jours sans discontinuer (3-6-9).
    S’il fait chaud, le soleil brille, mais si le vent passe sur le Tanargue enneigé il est glacial, on essaiera de trouver un travail à faire dans un « Cagnard », lieu abrité du vent et au soleil.
  • Le vent du sud dépend du temps, s’il ya de gros nuages noirs qui arrivent c’est le marin, on le sent arriver, les rhumatismes se réveillent, « ça s’amarine » ou alors « ça souffle d’embat ». Il amène la grosse pluie qui transformera les chemins en torrents et les génoises en cataractes.
    Par contre, s’il fait sec c’est le vent desséchant : le sirocco, il tape sur les nerfs et donne mal à la tête. Les jours d’orage, les vents tourbillonnent, le vent peut devenir une furieuse bourrasque, c’est alors la « Sisample », elle soulève les tuiles sur les toits. Lorsque l’orage gronde et que l’on voit la pluie se diriger vers « la Serre », au sud, on dit : « s’il pleut sur Barjac, prends ton bœuf et va-t’en labourer ».
  • L’été est très agréable lorsque souffle le vent doux venant de l’est, l’aïjalas.
  • Le vent d’ouest est la traverse, elle amène les gros nuages gonflés de pluie fine et froide qui tombe longuement, c’est bon pour l’arrosage, cela traverse mieux la terre que les pluies du marin qui ruissellent.

La grêle est l’ennemi du paysan, on essaie d’y remédier en sonnant les cloches, celles de Sampzon sont réputées. Une variante sera essayée dans les années soixante avec des fusées paragrêle, elles feront surtout beaucoup de bruit, elles aussi, et on y renoncera. Si la pluie dure trop longtemps au printemps on aura abondance de foin mais « annado de fé, annado de ré », année de foin, année de rien.

Les animaux :

On vit toute la journée auprès d’eux, il faut communiquer avec eux, leur parler et ils finissent par comprendre, apprivoisés ou « dressés » selon le cas.
Pour faire avancer les chevaux on leur dit : « io », pour aller au pas : « y’ iop », pour partir au trop (c’est plus vif), « hov’là-arrê » pour les arrêter, Ola là là » pour les faire ralentir au trot sur le « char à bancs », « I-io » pour tourner à droite et « I-ti » pour tourner à gauche ; on les fait reculer en leur disant « Harrié ». Pour leur demander de bien vouloir se déplacer pour faciliter l’extraction de la litière, il faut leur dire : « oité » (« oité-o et « oité-ti », selon le sens souhaité).
Pour les bœufs et les mulets, il faut y ajouter une bonne dose d’injure amicale : pute de bio, Io ! » Pour faire boire un cheval qui n’en a pas envie (l’abreuvoir automatique est une invention récente), il faut siffler.

On préfère les chevaux qui ont du « ventre » pour le travail, on les croit plus solides et durs à la peine. On reconnait l’âge des chevaux à l’usure de leurs dents, pour les bœufs aussi mais c’est moins précis.

Les chiens, ils servent à garder la maison et les animaux du troupeau, ils errent dans le village à leur guise (certains traversent le Chassezac pour aller améliorer la race du village voisin). Pour faire partir les chiens errants on leur dit : « viaïi-té Tchi » ou on  » gui nt che  » avec un caillou celui qui ne veut pas comprendre, il sera plus intelligent la prochaine fois, il se mettra hors de portée de caillou.

Les chats on les fait déguerpir en criant « Tcha ! » tout en tapant du pied. On dira « lou tchi fan pa dé tcha » pour exprimer que le fils ne vaut pas mieux que le père…

Le chevrier rassemble ses bâtes au cri de « ap-ap-ap-cabré, cabré-cabré », la fermière regroupe ses poules (elles se promènent en liberté…) en disant : « gouti-gouti-gouti ».

Le rouge gorge (« lou rigaou ») joue à cache-cache avec celui qui va aux champs, il s’approche et vous interpelle (tchi tich ttip), il est très familier.

Le blaireau (« lou taï ») est très gras, on dit de quelqu’un qui « se porte bien », qu’il est gras comme un « taï ». Sa graisse sert à faire des pommades.

Les corbeaux (croupatas) sont de mauvais augure. Les petits oiseaux sont regroupés sous le nom générique de « passerous », il ya des années où il y a beaucoup de pinsons (quinsous).

La pie ou « l’ajassa » est voleuse on le sait, prise jeune au nid elle s’apprivoise et répond à son nom, elle apprendra même à parler comme un perroquet, si on lui coupe le filet qui retient la langue.

Les cigales, tout l’été, font l’orchestre. Les enfants les attrapent et les font chanter en leur appuyant sur le ventre avec le doigt. A leur sortie de terre, elles muent et abandonnent leur vieille peau, on la récupère pour faire des tisanes contre la toux.

Les grenouilles pullulent dans les jardins, concert de soirée garanti.

La talabrène ou salamandre, animal antédiluvien, fait peur c’est un peu magique…

Le lézard, attention il mord ! Heureusement il est peureux ! Il y en a des très gros.

Les serpents (le bruit que les écologistes lâchaient des vipères ne courrait pas encore) : il s’agit de couleuvres. On les tue en les faisant tournoyer en les tenant par la queue. La force centrifuge leur fait affluer le sang à la tête et elles en meurent.

Les doryphores : ils s’attaquent à la pomme de terre et aux tomates. L’invasion de ces insectes est récente, elle se propage de vallée en vallée. Au marché de Vébron, on en discute, un cévenol écoute Marius, le commis du marchand de boeufs, et lui dit « ai pa mai vis d’aquelos bestias », je n’ai jamais vu de ces bêtes-là…, qu’à cela ne tienne,l’an prochain »t’en apporterai ». Promesse tenue l’an d’après notre luron apporte une pleine boite de bestioles…, vivantes… Il n’y a pas eu de pommes de terre cette année-là à Vébron !

La houppe, c’est la « pupude », on raconte que dans le temps elle ne chantait pas « pu-pu », jusqu’au jour où un enfant facétieux aurait déniché ses œufs et mis un étron à la place. La houppe revenant, surprise par l’odeur s’est envolée en criant « pu! pu ! », d’où son nom à présent.

Les escargots : il y a, chez nous, abondance de petit gris. Il y avait même un expéditeur à Chandolas qui en faisait grand commerce.

La cuisine :

Les recettes les plus en vigueur pour la cuisine sont celles qui utilisent les produits de l’élevage et mijotent longtemps sur la braise, plus tard sur le fourneau que l’on alimentera avec le charbon venu de Bessèges ou de Molières. L’été on peut aussi porter son « toupi » au boulanger qui le mettra à mijoter dans un coin de son four.

Citons pour mémoire :

  • la fougnà : sorte de très grosse crêpe;
  • la bombine : pommes de terres mijotées en rondelles avec du laurier-sauce;
  • la daubo : l’équivalent local du boeuf bourguignon;
  • le civet : de lapin ou de lièvre, on lie la sauce avec le sang de l’animal, on fait un « sangué ».
  • la croustade « quinsous » grillés au lard ; ils ne « valent pas la cartouche » ; on les a donc attrapé au piège, sous une planche retenue par un bâton, une ficelle permet de télécommander la chute de la planche sur les pauvres passereaux attirés par du grain;
  • les caillettes ;
  • la jambonnette ;
  • les champignons, mais attention il ne sont pas tous bon à manger, on peut en mourir « passer par la cheminée » c’est mourir de cet empoisonnement.

Les plats mijotés se font dans des récipients en terre à feu, lou toupi. Un dicton en découle, qui veut dire que chaque fille trouvera bien l’homme qui lui faut : « tchaque toupi traouve sa capucelle » (son couvercle). Signalons aussi une soupe rudimentaire « l’aigo boulido », ancêtre des soupes « chimiques » ; la préparation est instantanée, il suffit de verser de l’eau bouillante sur une tranche de pain frottée à l’ail et arrosée d’une cuillerée d’huile d’olive.

Les soirs d’hiver, on réchauffe son lit avec des galets du Chassezac mis à chauffer dans l’âtre (ou dans le fourneau de la cuisinière) et emmitouflés dans un torchon. On passe aussi la bassinoire en cuivre alimentée avec des braises.

On recueille l’eau pour boire dans un « feirat » le seau en cuivre, on y prend l’eau avec une « Couade », sorte de grande cuillère ou de gobelet emmanché.

La lessive :

On fait bouillir son linge à la maison avec l’eau du puits dans une grosse lessiveuse. On ira rincer à la rivière, on transportera le linge sur la charrette dans des paniers d’osiers (banastes). Les enfants s’amusent pendant que les femmes, agenouillées sur un rocher les genoux dans une caisse en bois, ouverte sur un côté, battent le linge avec leur battoir.

Il faut faire attention car si le soir vous entendez des bruits lugubres inexpliqués, ce sont des esprits qui rodent ! C’est la « trévo », le maréchal ferrant de Beaulieu a reçu commande d’un piège à loup pour essayer de l’attraper, mais la « trévo » court toujours et fait peur aux enfants la nuit. Les fées s’assemblent dans les lieux déserts (las fados) ; mais gare au mauvais sort, celui qui a le mauvais œil c’est le fachinaire, son regard est maléfique pour les gens, les animaux, les récoltes : ceux qui sont connus pour « porter fachine » sont à éviter. Pour briser le mauvais sort (on l’attrape aussi si on renverse la salière ou si l’on met des couteaux en croix), il faut expédier une pincée de sel avec sa main droite par-dessus son épaule gauche !